NON A UN CERTAIN « PRÊT A PENSER » …

Pensez-vous que le Nouveau efface l’Ancien ? Pensez-vous vraiment que des Saddam Hussein, des Kadafhi, des Talibans, ….gommeront des Aristotes , des « Jésus-(Christs) », des « Zolas », écrivain français condamné pour avoir défendu Dreyfus, le petit juif, dans son fameux « J’accuse », des « Senghors », ancien président du Sénégal et qu’ils feront fleurir des petites républiques suisses aux quatre coins de notre monde globalisé?

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Henri Matisse: La Conversation

Nous devons admettre sans aucune naïveté que ces derniers ont, chacun à leur façon, étant ancrés dans leurs temps, construit une Laïcité du respect et de la Liberté de Conscience pour chaque citoyen et mis en place un mode opératoire, séparant non seulement l’ Etat et les Idéologies religieuses ou non.
Ils ont eu ce cran de ne pas mettre un « cache-sexe » sur l’Humain.
Le fil conducteur de leurs pensées grâce à ce principe appelé « Laïcité » fut de reconnaître que, quelques que soient nos convictions philosophiques, cette « Laïcité » est universelle.
En effet, nous aspirons tous au même besoin de respect, de participation, d’appartenance, d’écoute….
Ces besoins sont réciproques : le désir d’être respecté implique l’aspiration à respecter. Etre respecté va de pair avec écouter… Nous sommes donc des Etres de besoin comme l’écrit Marshall Rosenthal, un des pères de la non -violence. Ils ont démontré qu’il y a des moyens de vivre la dépendance et l’interdépendance sans écraser l’ autre, ni le tyranniser, que sans l’autre, nous restons des « Robinson Crusoé » affamés et isolés de relations, seulement et seulement si nous restons fidèles à notre Conscience.
Ainsi de tous les Grecs, Aristote est sans aucun doute celui qui a mené pour toujours avec la plus grande profondeur humaine la réflexion sur le bonheur de la Cité sans exclure les personnes prisonnières de guerre, les esclaves. Plaisir, amitié, recherche de la vérité et de l’amour sont pour lui autant d’éléments qui y concurrent. Le lien qui unit morale, psychologie et spiritualité peut encore aider l’homme d’aujourd’hui, englué dans le tourbillon de ses activités quotidiennes, à trouver sens à sa vie, c’est-à-dire à voir clair en lui- même et à faire le meilleur usage de sa vie.
Jésus, ce Juif, que certains accusent , à tort ou à raison, c’est selon, de s’être pris pour Dieu, n’ a fait qu’une seule chose : renverser la pensée dominante de son temps. Le lavement des pieds, loin d’être une caricature, en est le signe le plus marquant. Pierre, son chef de cabinet, ne comprends pas pourquoi Jésus, son boss, veut lui laver uniquement les pieds. Il lui demande de lui donner une douche. Pierre, homme de pouvoir a peur. Il craint pour sa place. Et Jésus lui réplique simplement : « mon cher Ami, si tu veux être le Chef, apprends d’abord à servir, ensuite tu pourras véritablement diriger autrui car tu auras compris, je te le souhaite du fond du coeur, que pour servir, il faut d’abord se laisser servir par tes collègues ».
Des siècles plus tard, Emile Zola, au nom de sa liberté de Conscience, accuse en écrivant au Président français Auriol que le procès de Dreyfus, ce juif prétendu collaborateur devant le tribunal militaire, n’est qu’une mascarade, une vaste plaisanterie, une caricature. Zola est condamné pour avoir remis en question les stériotypes de ce début du 20ième siècle, Dreyfus est réhabilité des années plus tard, ce que Zola ne saura jamais puisqu’il meurt entre- temps. Au nom du refus du mensonge, l’on peut donc affirmer, sans risque de se tromper, que l’action d’ Emile Zola fut de haute noblesse : la gratuité.
Enfin, je m’en voudrais de ne pas évoquer Léopold Sedar Senghor, poète et premier président du Sénégal après la décolonisation. Il est le chantre de la visibilité démocratique africaine, refusant toute transposition des idéologies marxistes dans son pays. L’élément clef de sa vision démocratique à « l’africaine », son chef-d’œuvre, fut la création des « coopératives villageoises » qui mariaient à merveille les traditions africaines et les valeurs démocratiques. Un homme de pouvoir qui, en décentralisant, créa les fondements de solidarité entre les ethnies du pays, creuset de l’essor politique, économique et culturel de sa patrie. Sa vision ouvrit par surcroît à des dialogues non paternalistes avec les nations occidentales et orientales. En prenant distance face aux étiquettes qui gangrènent, il a ouvert toutes les voies d’un dialogue, d’un véritable partenariat où il n’ y a pas ceux d’en bas et ceux d’en haut.

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Force m’est cependant de constater qu’aujourd’hui la Culture , déjà remplacée par le Politique depuis des lustres , est aussi balayée par l’Economique et le Capital, nos nouveaux leitmotifs.
Récemment, le premier Ministre français, Manuel Vals, socialiste, déclarait : « j’aime les entreprises ! » Or, a- t-il à les aimer ? Un Premier Ministre doit les respecter, les apprécier, les reconnaître, les encourager dans leur désir d’entreprendre…. Mais les aimer quand le taux de chômage ne cesse d’augmenter…. n’est-ce pas insultant ?
A sa décharge, je dirais qu’il vit avec son temps, Maître Vals. Il communique haut, fort et bien, mais dirige-t-il vraiment en omettant de mentionner ceux, tellement nombreux, ravagés par les systèmes qui poussent toujours en avant ceux qui ont les moyens de s’exprimer ?

Il y a urgence à reconstruire une Laïcité rigoureuse qui passe par l’Education et non les Armes, une Laïcité qui ose s’affranchir du périssable et du contingent, une Laïcité qui refuse l’Utilitaire, une « Laïcité » moins légère, qui intègre, en ces temps de métissages culturels, identitaires et centrifuges.
A la Laïcité  des «  Moïses », légalistes et monolithiques, qui ruent dans les brancards quand la populo de leurs temps ose construire des veaux d’or , signaux d’une incertitude et d’une insécurité et non pas simplement l’expression d’ une crédulité ridicule, à des Ben Laden, exaltés qui portent aux pinacles leur prophète pour abuser les adeptes et qui prennent comme prétexte les injustices sociales et de libertés pour assoir leur propre domination économique, je préfère celle d’ un Aristote, de Jésus, de Zola, de Senghor et de tant d’autres…. qui donnent la parole « Aux Sans- Voix », l’écoutent et l’honorent.
Il n’est pas trop tard pour agir, réviser certains codes mais grand temps de ne plus se laisser berner par le Prêt à Penser » ambiant.

matisse-la-danseHenri Matisse: La Danse

Author: Jean Pierre Aussems

(1956, Eupen) aussemsjeanpierre@gmail.com LinkedIn profil: https://be.linkedin.com/pub/jean-pierre-aussems/6a/276/599

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